Les Amis de Flaubert – Année 1963 – Bulletin n° 22 – Page 41
Un Billet de Flaubert à une Actrice
Ma chère Amie,
Tout à l’heure, en dînant, la princesse Mathilde a déclaré qu’elle n’avait trouvé de bien à la première de « Balsamo » que Mme Pasca, puis on a parlé de vous, et la Princesse s’est étendue sur toutes vos perfections extérieures : figure, toilette et manières.
Il va s’en dire que je vous ai débiné. Bref, la Princesse vous invite à venir chez elle, mercredi prochain, à 9 h. 1/2. Je suis chargé de la commission, ne me faites pas d’affront. Vous me ferez demander par un domestique et je vous présenterai.
Nous nous verrons d’ici là, chez Charpentier, vendredi, n’est-ce pas ? Tout à vous, la plus chère des belles.
Votre
G. F.
Nuit de mercredi 1 heure.
Il ne fait pas de doute que le billet était adressé à Mme Pasca, actrice fort connue du Second Empire. Il porte en tête un cachet : Autograph collection of Dr Thorek, Chicago. Il ne paraît pas être connu en France.
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Une lettre inédite de Flaubert à Maupassant
Le dernier catalogue de la librairie Charavay (n° 711 – mars 1963) concernant les lettres autographes d’auteurs propose pour 1.300 fr. une lettre de Flaubert à Maupassant du 31 octobre 1877, en vue de Bouvard et Pécuchet. Malheureusement elle n’est pas donnée en entier (3 pages in-8, inédite).
« Comme je suppose que vous n’êtes pas mort, car entre parenthèses, vous êtes un joli cochon de ne pas me donner de vos nouvelles, je vous prie de me rendre le service suivant… J’ai besoin d’une falaise qui fasse peur à mes deux bonshommes… Je l’ai… cherchée.., tout l’après-midi aux environs du Havre. Mais ce n’est pas ça. Il me faut du calcaire à pic comme les falaises de Fécamp et d’Étretat… Vous devez connaître ces parages à fond. Donc, donnez-moi une description de toute la côte depuis Barneval jusqu’à Étretat… J’aurais préféré que B. et P. commençassent leur promenade géologique au Havre. mais c’est impossible… après une dissertation sur la fin probable du monde… par un cataclysme, ils se montent le bourrichon… deux ou trois cailloux s’éboulent. Alors, une terreur panique les empoigne… L’un d’eux se perd dans une valleuse… Voilà ce qu’il me faut… Je me fie à vous, comptant sur une réponse immédiate. Ces renseignements arrivés, je n’aurai plus que trois au quatre pages pour avoir terminé mon chapitre des sciences… »
Il pense avoir fait la moitié du chapitre de l’archéologie au Jour de l’An. Après avoir fait quelques compliments gaillards sur l’état physique de son correspondant, Flaubert ajoute un post-scriptum :
« Merde pour Mac-Mahon ».
Puis, sur le livre de Victor Hugo qui vient de paraître
« Savez-vous que l’Histoire d’un crime est un très beau livre. Quelle narration ! Et que de malices dans cette simplicité ! »