Les Amis de Flaubert – Année 1967 – Bulletin n° 31 – Page 44
Les Rouennais et Flaubert
À Naples
Nous comptons à Naples d’ardents Flaubertistes à l’Université. En tête un professeur M. Alberto Cento qui publie l’édition critique de Bouvard et Pécuchet. Il a formé des émules en particulier Mlle Léa Caminiti qui est également venue travailler à la bibliothèque municipale de Rouen, sur les manuscrits de Flaubert, préparant l’édition critique du Dictionnaire des Idées reçues. Elle vient d’épouser, à Naples, M. Raffaele Pennarola et a eu la délicatesse de nous le faire savoir, nous avisant qu’elle continuerait ses travaux flaubertiens et qu’elle reviendrait en Normandie, avec son mari l’an prochain, à la belle saison. Nous l’accueillerons avec plaisir et nous lui présentons nos meilleurs vœux.
Naples est une ville flaubertienne. Une jeune bibliothécaire normande de passage en Italie fut reçue à Naples dans une famille très francophile. Apprenant qu’elle était rouennaise d’origine, elle dut répondre longuement aux questions sur Flaubert et sur ce qui restait de son époque. Heureusement que le sort tomba sur une jeune fille fort lettrée.
Un prix bien mérité
Alors que le prix de la critique littéraire de 1967 décerné par un jury composé de MM. Yves Gandon, Pierre-Henri Simon, André Billy, Robert Sabatier, Mme Dominique Aury a été attribué à Daniel Gillès pour sa biographie de Tchékhov (Julliard) par 6 voix contre 5 à Paul Bérichou pour l’écrivain et ses travaux (Corti), le même jury a attribué le prix de l’édition critique, à l’unanimité aux trois tomes de la Correspondance de George Sand, publiés par notre collègue Georges Lubin, dont nous publions dans ce numéro le discours qu’il a prononcé à Croisset, en mai dernier.
Nous nous en réjouissons et nous y joignons son épouse, ancienne journaliste à l’Excelsior, qui, dans cette publication monstre lui apporte tous les jours une aide précieuse. À tous deux nos bien sincères félicitations et nos encouragements pour mener à bonne fin cette longue mise au point.
Nos disparus
Nous avons appris la mort de M. Lucien Denis, un chercheur rouennais pour l’histoire locale et fidèle membre de notre société, qui participait a toutes nos manifestations et sorties ; celle de Me Ozanne, ancien notaire à Rouen, qui fut celui, de Madame Commanville, nièce de Flaubert, également membre de notre société. La dernière en date est celle de M. André Maurois, ancien Elbeuvien et Rouannais qui nous a toujours montré sa fidélité à notre société. A leurs familles, nos regrets.
Le Petit Rouennais et Tourguenev
A la mort de Tourguenev, le quotidien radical rouennais ( 12 septembre 1883) écrivait : « Le rapprochement de ces deux noms (Tourguenev et Flaubert) est inévitable.
D’autres ont raconté l’amitié qui unissait le poète de la Russie et le grand romancier français. Ce qui nous frappe nous, dans ce parallèle de ces deux illustrations, c’est la façon dont leur mort a été accueillie par leurs concitoyens.
On a vu hier, dans nos dépêches, que le Conseil municipal de Saint-Pétersbourg enverrait une délégation aux obsèques de Yvan Tourgeunev. Le maire y assista.
Une bourse sera instituée en son honneur et la ville fondera une école primaire qui portera son nom.
À Rouen personne ne suivait le corps de notre illustre Flaubert — la population demeurait indifférente — et l’Académie ( ? ? ? ) locale cherchait à diminuer sa gloire. Aucun hommage ne lui a été rendu, et, dans un pays si prodigue de statues, il n’a même pas encore son buste.
C’est du nord que nous vient la lumière, dit-on. C’est douteux, souvent. Mais la Russie nous prouve qu’elle peut nous donner des leçons de respect envers les grands hommes. (L.L.) »
De nos jours, les municipalités rouennaises ont un comportement différent. Elles se font représenter aux manifestations que les Amis de Flaubert organisent, préparent matériellement notre visite à Croisset, en entretiennent avec un gardien à demeure le jardin, le gueuloir, le pavillon et nous accordent une subvention annuelle, qui n’est pas tout à fait celle que nous désirerions, mais qui facilite notre trésorerie. Quant à l’Académie locale disons que notre association n’y compte pas davantage de membres que Flaubert vivant y comptait d’amis, sauf son camarade de lycée Félix. C’est peu mais c’est ainsi.
Un vœu de la rédaction
Le prochain numéro de notre revue, sera consacré en grande partie à une longue étude, avec clichés, sur Flaubert en Algérie, de Madame Besson qui a vécu de nombreuses années comme professeur de lycée à Constantine. Le numéro suivant apparaît encore bien creux ; nous serions donc heureux de recevoir des articles sur Flaubert, Maupassant, Bouilhet, les Goncourt, etc., ainsi que des échos. Notre bulletin est une œuvre qui a besoin de s’affirmer collective et de montrer sa vitalité interne, par de brefs ou de longs articles venus de ses membres.