Les Amis de Flaubert – Année 1979 – Bulletin n° 55 – Page 3
Centenaire de la mort de Flaubert
Le centième anniversaire de la mort de Gustave Flaubert approche et nous devons le célébrer. Nous y avons vaguement songé depuis plusieurs années, nous demandant ce qu’il serait possible et logique d’organiser pour marquer à Rouen cet événement littéraire. En 1921, au lendemain d’une guerre éprouvante, ce fut la municipalité de la ville qui organisa le centième anniversaire de sa naissance, un samedi de mai, avec la présence de Léon Bérard, ministre de l’Instruction publique et fin lettré. Paris célébra ce centenaire en novembre avec l’inauguration de son buste dans le jardin du Luxembourg. Ce fut à peu près tout, sauf qu’à Rouen, une série de conférences de Paul-Louis Robert furent organisées par la Société Libre d’Émulation et publiées dans son bulletin. De plus, le bureau de cette société et celui de l’Académie locale s’étaient rendus au pavillon de Croisset, le second dimanche de mai, pour rendre hommage à ce grand Rouennais qui n’avait été membre d’aucune d’elles.
Cinquante-huit ans ont passé et il nous échoit de célébrer convenablement le centenaire de sa mort. Notre société a été reconstituée depuis 1948 et notre premier devoir est de manifester notre sentiment de fidélité et d’admiration, en mai prochain.
Les colloques sont à la mode. Ils permettent d’approfondir une œuvre littéraire et de mieux cerner le comportement de son auteur, apparemment et subconsciemment. Nous avions pensé renouveler ce qui avait été réalisé avec succès à nos yeux en 1969, avec le centenaire de l’Éducation Sentimentale. Malheureusement, nous ne pensons pas le pouvoir. On peut trouver surprenant et inattendu que nous ayons appris récemment l’organisation d’un colloque sur Flaubert et Maupassant à la faculté des lettres de Rouen – Mont-Saint-Aignan en mai prochain et d’une manière incidente par l’un de nos membres, professeur à Nantes, sans quoi nous ne l’aurions pas su de sitôt. Il doit s’agir d’un colloque inter-universités et notre société n’y a pas naturellement sa place. À nos yeux, tenir deux colloques à Rouen à quelques jours d’intervalle nous apparaît ridicule et surtout mesquin. Nous ne verserons pas dans ce travers, car nous tenons à ce que notre société qui a toujours soutenu et défendu l’Université de Rouen dans son ensemble, continue et persiste, malgré ce fâcheux malentendu. Nous nous jugeons irresponsables mais non victimes, regrettant seulement que la faculté des lettres n’ait pas pris exemple sur ce qui avait été réalisé en 1969 : l’union de la jeune université avec la ville passée et présente. De plus, Mont-Saint-Aignan comme Croisset sont dans la périphérie et nous savons par expérience que les Rouennais s’y rendent difficilement et presque à regret. Nous tenons que, dans la ville-même, ce centenaire soit fortement marqué et nous nous en chargerons.
Nous modifions donc nos perspectives initiales et nous préparons dans la mesure de nos moyens financiers et de nos maigres réserves, un opuscule spécial dont le titre sera évocateur : Les Rouennais et les Flaubert. En clair, ce que les générations successives de Rouennais ont dit et pu penser de cette famille, maintenant complètement éteinte, depuis que le premier de la lignée Achille-Cléophas est venu s’établir chirurgien à Rouen. Tous ces articles sont préparés par des auteurs ayant vécu un moment de leur vie dans cette ville facilement contestée et brocardée, lesquels en connaissent par expérience ses qualités, et elle en a, et les défauts collectifs qu’ils ne nient pas.
Bien entendu, nous saluons par avance l’initiative d’une grande exposition sur Flaubert, prévue en mai au musée des Beaux-Arts, organisée par la bibliothèque municipale et qui durera plusieurs semaines. Ensuite, elle sera présentée à Paris, à la bibliothèque nationale en novembre, comme il se doit.
Nous irons naturellement sur la tombe de Flaubert au cimetière monumental, cent ans après que ses amis littéraires Zola, Banville, Hérédia, Bergerat, de nombreux journalistes français et étrangers et une centaine de Rouennais l’y ont conduit trop jeune pour son brillant talent. Nous organiserons une conférence dans la ville même afin de rappeler le Rouennais plus mécontent que satisfait qu’il fut et son roman, Madame Bovary, qu’il nous a laissé comme héritage. Nous nous réunirons en un dîner amical, comme il est de bon usage en Normandie. Nous conduirons une excursion purement flaubertienne. Pour ce programme modeste mais suffisant, nous nous réservons les samedi et dimanche 10 et 11 mai.
Pour réaliser ce programme, nous avons compté en plus de nos petites réserves, sur les participations financières de la ville et du département et seulement sur elles. Nous demandons aux membres de notre association par souscription une contribution facultative et exceptionnelle, afin de préserver par la suite, la publication régulière de notre bulletin, notre constant souci, lequel exige chaque année presque un million et demi de centimes et nous pensons que les uns et les autres, proches ou lointains, étrangers et français, y répondront avec ferveur.
Il y aurait encore d’autres détails à signaler, notamment du côté de Paris, avec la « Délégation générale aux célébrations nationales » que nous ignorions totalement, ce qui peut être reporté au prochain numéro.
Avant tout, nous tenons et voulons que Rouen, ville natale de Flaubert et qui conserve ses restes, où il a vécu les cinq sixièmes de son existence, n’apparaisse pas comme une ville d’un désert intellectuel français par rapport à la capitale.
André DUBUC