1956 La vie de notre Société 2

Les Amis de Flaubert – Année 1956 – Bulletin n° 9 – Page 45

 

La vie de notre Société

Dimanche 11 mars 1956 : Représentation à Rouen de Madame Bovary, p. 45 ‒ Dimanche 22 avril 1956 : Inauguration du Musée Barbey d’Aurevilly, à Saint-Sauveur –le-Vicomte, p. 45-46 ‒ Dimanche 6 mai, à Croisset : Hôte des Amis de Flaubert, pour le Centenaire de Madame Bovary, André Dubuc a parlé du Roman dans le jardin de Croisset, p. 46-47 ‒ Dimanche 17 juin 1856 : Visite à Ry, Rouen et à Croisset d’Excursionnistes de Malakoff, p. 47

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Le Dimanche 11 Mars 1956

Représentation à Rouen de Madame Bovary

Nos deux amis rouennais, René Fauchois et Emmanuel Bondeville, ont, par l’intermédiaire de la Municipalité de Rouen et de M. Paul Douai, directeur du Théâtre-Cirque, fait représenter, à Rouen, Madame Bovary, opéra-comique tiré du célèbre roman. L’œuvre est vivante, mais Flaubert eût-il été enthousiasmé de voir son œuvre mise à la scène ? On peut en douter ! Nous sommes suffisamment renseignés pour savoir que l’écrivain s’était toujours refusé à laisser mettre au théâtre Madame Bovary, dont aucun élément n’est scénique. À un auteur qui lui proposait un essai de ce genre, Flaubert déclina l’offre, expliquant à un correspondant de l’époque que « ce mélange d’art et d’écus m’a paru indigne, et je suis rentré dans ma tanière « . Cent ans après la parution du roman, le non possumus de l’ermite de Croisset est-il encore valable ? Aux auteurs… et au public à résoudre ce problème de la littérature et du temps, mais les tentatives pour mettre Madame Bovary à la scène ou à l’écran n’ont pas souvent donné les résultats, tout au moins artistiques, souhaités.

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Le Dimanche 22 Avril 1956

Inauguration du Musée Barbey d’Aurevilly,

à Saint-Sauveur-le-Vicomte

Le débarquement allié et les batailles qui se sont déroulées en juin 1944 dans le Cotentin avaient entièrement détruit le Musée Barbey d’Aurevilly, de Saint-Sauveur-le-Vicomte (Manche), où la piété et la vigilance de Mlle Read, exécutrice testamentaire de Jules Barbey d’Aurevilly avaient réuni des souvenirs littéraires du plus haut intérêt sur le Connétable des Lettres.

Grâce à la ténacité d’un groupe de lettrés de Saint-Sauveur et de la Manche, le Musée Barbey d’Aurevilly a été reconstitué et réinstallé dans le vieux château de la charmante ville cotentinoise.

Cette cérémonie de réouverture, à laquelle le Comité Barbey d’Aurevilly avait bien voulu convier la Société des Amis de Flaubert — encore que les deux grands écrivains n’avaient pas l’un pour l’autre une sympathie particulièrement vive ! — s’est tenue à Saint-Sauveur-le-Vicomte, le dimanche 22 avril 1956, devant une nombreuse assistance venue non seulement de la région de Saint-Sauveur, mais aussi de la Manche, du Calvados, de Rouen et de Paris.

Après une messe célébrée à la mémoire de Jules Barbey et de sa famille, en présence de Mgr Guyot, évêque de Coutances, de nombreux pèlerins se rendirent devant la maison natale de Jules Barbey et devant celle où il vécut (deux plaques en bronze en rappellent le souvenir). M. Hermann Quéru, homme de Lettres, évoqua, en termes excellents, l’enfance de l’écrivain. La cérémonie d’inauguration eut lieu dans la cour du vieux château. Y prirent successivement la parole : M. le. Maire de Saint-Sauveur ; M. René Herval, président de la Société des Écrivains Normands ; M. Jacques de Lacretelle, de l’Académie Française, et M. le Préfet de la Manche. Après cette cérémonie, on visita avec le plus vif intérêt le Musée Barbey d’Aurevilly, où, grâce à la perspicacité et au zèle de M. Le Berruyer, dont le dévouement égale la compétence, se trouvent exposés de remarquables documents concernant Barbey et son œuvre. Les nombreuses dédicaces de Mlle Read, les manuscrits aux encres de couleurs, les dessins les plus bizarres qui venaient jadis sous la plume de l’auteur des Diaboliques se montrent dans leur curieuse complexité. Avec Flaubert, Barbey d’Aurevilly est un de nos grands écrivains et leur rapprochement, malgré la rudesse de leur mutuelle hostilité, s’impose maintenant avec le temps.

M. Jacques Toutain-Revel, président de la Société des Amis de Flaubert, représentait notre Société à cette belle fête du Régionalisme et du Souvenir.

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Le Dimanche 6 Mai, à Croisset

Hôte des Amis de Flaubert, pour le Centenaire

de Madame Bovary, André Dubuc a parlé du Roman

dans le Jardin de Croisset

Les Amis de Flaubert célébraient, le dimanche 6 mai, à Croisset, dans le jardin, au pied du gueuloir, ce talus où l’écrivain aimait à s’entendre lire, pour mieux se juger, le centenaire de Madame Bovary.

L’assistance était nombreuse et recueillie. Il faisait un soleil d’été. Ce n’était pas pour rien hier le premier vrai dimanche de la saison. La Seine clapotait contre les berges. Les jeunes feuilles respiraient la lumière.

La plupart des pèlerins se tenaient debout, à l’endroit où l’allée tourne vers le pavillon. Une pierre plate, judicieusement placée, servait de petite tribune aux orateurs. Les messieurs se tenaient debout. Les dames avaient étalé leur mouchoir sur la pierre du mur et, assises, écoutaient les discours en rêvant peut-être à cette Emma qui n’a décidément pas fini de faire parler d’elle.

M. Jacques Toutain, président des Amis, improvisa une vibrante introduction, mêlant tout à la fois les noms de Flaubert et de Corneille, affirmant que ces gloires sont les vivants symboles de l’heureux destin de la France.

Puis M. Toutain donna la parole à M. André Dubuc, président de la Société Libre d’Émulation. Pendant quarante-cinq minutes, M. Dubuc réussit cet incontestable tour de force de captiver son auditoire, malgré les distractions qui menacent inévitablement toute causerie, tout spectacle de plein air.

Mais ni les bruits des moteurs, les sirènes de bateaux, ni même le chant des oiseaux, pas plus que les grands souvenirs dont ce cadre est plein, ne détournèrent l’attention.

André Dubuc a, en effet, tracé avec une sûreté de plume, un sens analytique profond et une clarté remarquable, un brillant portrait de Flaubert, de son œuvre et aussi de son temps. Le mérite d’André Dubuc, c’est peut-être, plus précisément, d’avoir mieux situé Flaubert, non seulement par rapport à nous, mais aussi vis-à-vis de ses contemporains.

La parution de Madame Bovary, en 1856, ne provoqua pas de grand remous. Rouen était encore tout affairée, dressée derrière ses comptoirs, retranchée dans ses magasins. « L’oisiveté que réclame le culte des Arts et des Lettres y est inconnue « , note joliment André Dubuc.

Aussi bien, il est impossible ici de résumer cette belle et dense causerie. Disons pourtant — ce que souligna fort à propos André Dubuc — que Madame Bovary est une étude rouennaise, un témoignage sur la vie rouennaise.

Enfin, sans entrer dans la querelle sur les sources de Yonville-l’Abbaye, le conférencier propose une définition séduisante : « Il serait plus sage de considérer ce bourg d’Yonville-l’Abbaye comme une sorte de satellite artificiel de la région rouennaise, créé et aménagé par Flaubert pour assurer l’existence même de son roman et lui donner à la fois sa compréhension et son équilibre « .

M. Toutain remercia avec enthousiasme André Dubuc pour sa brillante contribution au centenaire de Madame Bovary. Il remercia les personnalités, parmi lesquelles on remarquait la présence de Me Bernard Tissot, adjoint aux Beaux-Arts à Rouen ; MM. Poullain, maire de Canteleu-Croisset ; Paul Vauquelin, maire de Maromme, conseiller général ; le Premier Président Ricaud ; Adnet, inspecteur d’Académie adjoint ; Fouyé, conseiller à la Cour ; Mlle Leleu ; MM. Rouault de la Vigne, président de l’Académie de Rouen ; Robert Eude, secrétaire de la Société Libre d’Émulation ; le bâtonnier Macqueron, et les Amis de Flaubert : MM. Sénilh, trésorier ; Andrieu, A. Pierre-Pani, Creignou…

On visita ensuite le pavillon et l’on signa le Livre d’Or. Puis, guidés par MM. Poullain et Vauquelin, président départemental des H. L. M., on se rendit sur le coteau, à la Cité Verte, cette magnifique réalisation destinée à faire plutôt, des petits villages de Canteleu et de Croisset, une rayonnante ville aux portes de la grande cité.

Roger Parment.

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Le Dimanche 17 Juin 1956

Visite à Ry, Rouen et à Croisset d’Excursionnistes de Malakoff

Le dimanche 17juin, un groupe de visiteurs appartenant à la Bibliothèque Communale de Malakoff (Seine), conduit par M. Grouiller, président du Conseil d’administration, et M. Émile Souze, homme de lettres et conférencier de diverses Associations, est venu en Normandie pour y visiter Ry, Rouen et Croisset. L’excursion avait en devise : « Une journée Flaubert et sa Normandie « .  Après une excursion en forêt de Lyons et une visite à Ry, le groupe de flaubertistes est venu à Rouen visiter le Musée Flaubert de l’Hôtel-Dieu et le Pavillon de Croisset. À Rouen, le groupe a été reçu par M. Jacques Toutain-Revel, président de la Société des Amis de Flaubert, et par M. René Martin, conservateur du Musée de l’Hôtel-Dieu. Cette visite a enchanté les 55 membres visiteurs qui ont remporté, malgré une pluie persistante, un excellent souvenir de ce beau périple en Normandie.