Le manuscrit de Passion et Vertu

Les Amis de Flaubert – Année 1960 – Bulletin n° 16 – Page 25

 

Le manuscrit de Passion et Vertu

Lors de l’Exposition Flaubert qui eut lieu à la Bibliothèque Nationale en 1957, fut exposé le manuscrit de Passion et Vertu, l’œuvre de jeunesse de Gustave Flaubert, écrite en 1837 et qui fut (selon la dernière exégèse) la première narration de Madame Bovary (1).

Le précieux manuscrit, composé en 1837, est de dimension 310 X 220 m/m et comprend 35 feuillets.

Mme Lucien Graux en a fait le très généreux don à la Bibliothèque Nationale.

Dans un excellent article de Madeleine Cottin et Jean Bruneau (Revue Histoire Littéraire de la France, 1959, n° 4, octobre-décembre 1959), ce texte est décrit, encore que les auteurs de l’article déplorent, et à juste titre, les nombreuses fautes d’impression et autres de l’Édition Conard qui, dans les œuvres de Jeunesse inédites, le publia en 1910.

En voici quelques exemples les plus patents :

Page 241 : Émotions hideuses pour émotions indécises.

P. 244 : Service amoureux pour rêverie amoureuse.

P. 245 : Main invisible pour main de plomb.

P. 248 : Répercussion galvanique pour répulsion galvanique.

P. 249 : Parois pour pans.

P. 250 : Délices pour délires.

P. 254 : Attendre pour atteindre.

P. 260 : Drap blanc pour drap bleu.

P. 260 : Au jour de parade pour un jour de parade.

P. 260 : Sur les toits pour sur ses traits.

P. 262 : Malgré son départ pour malgré son dégoût.

Et voici la conclusion des auteurs de ce commentaire :

En ce qui concerne le texte, l’insuffisance de l’édition Conard est évidente. Certes, l’écriture de Flaubert n’est pas toujours facile à lire ; mais outre les erreurs et les omissions, la division en paragraphes est mal respectée et donne une idée fausse de la façon dont écrivait Flaubert : il compose par paragraphes nettement séparés, suivant en cela l’enseignement de ses maîtres au Collège Royal de Rouen. C’est là une habitude de composition fondamentale chez lui et dont il ne se départira jamais.

Une édition nouvelle des Œuvres de Jeunesse s’impose donc, qui donnerait un texte fidèle aux manuscrits, tiendrait compte des variantes importantes et réunirait la documentation déjà considérable qui s’est accumulée depuis 1910 autour des premières œuvres de Gustave Flaubert.

Madeleine Cottin et Jean Bruneau.

(1) Voir à ce sujet René Herval, « Du nouveau sur Madame Bovary », Bulletin Flaubert n° 5 ; Jean Pommier, « En marge de Madame Bovary », Bulletin Flaubert n° 6, avec Biographie du sujet.

Note de la rédaction. — Nous eussions été heureux de reproduire in extenso l’intéressant article de Madeleine Cottin et Jean Bruneau, avec les références d’usage, bien entendu. Nous n’avons obtenu de la Revue d’Histoire Littéraire de la France que l’autorisation de publier un bref commentaire de l’article et quelques extraits. Nous nous inclinons et même in partibus, cette autorisation ne diminue en rien la sincère expression de nos remerciements.