Les Amis de Flaubert – Année 1967– Bulletin n° 30 – Page 3
Amis de Flaubert ET de Maupassant ?
Éditorial
À la suite de notre demande pour connaître l’avis de nos lecteurs, si à notre titre initial, nous ne devrions pas y adjoindre, celui de Maupassant, nous avons reçu quelques lettres de littérateurs, favorables à notre demande et une seule, favorable au statu quo, mais non hostile, comme l’on dit.
Notre titre officiel est Les Amis de Flaubert et nous pensons que le contenu de notre bulletin pourrait devenir : Flaubert et ses amis.
Si nous avons songé au titre pour notre bulletin de : Les Amis de Flaubert et de Maupassant, c’est une vieille idée que nous avions manifestée à quelques-uns au moment de notre reconstitution en 1948, d’associer ensemble le maître et son disciple le plus aimé. Il y avait alors, ayant son siège à Paris, une société particulière s’intéressant à Maupassant, et qui a publié, fort irrégulièrement des bulletins ronéotypés (ce n’est pas du franglais), sur son œuvre. Notre société ne l’a jamais reçu en échange, comme nous le faisons avec d’autres sociétés littéraires, celles de Loti, Stendhal, Proust et autres, alors que sur la collection heureusement adressée de Bel Ami, à la bibliothèque municipale de Rouen, nous avions relevé l’adresse et envoyé régulièrement notre bulletin, sans rien recevoir en retour.
Depuis, nous avons appris que le directeur de cette publication sporadique était décédé dans une ville du Centre. Maupassant n’a plus véritablement de société. Pourtant, il le mérite. Les pays étrangers le connaissent mieux que Flaubert, parce que son style facilite le travail et la compréhension des traducteurs. Flaubert est avant tout musique phonique et valable pour ceux qui connaissent parfaitement les subtilités de la langue française. Ce que l’on aime chez Maupassant est différent : on est sensible à sa gouaille, à son observation directe des milieux populaires, qu’ils soient des villages cauchois ou des arrondissements parisiens. Il y a une ironie souriante dans les Nouvelles de Maupassant. Flaubert est différent : c’est un film volontairement froid, qui laisse à chacun de ses lecteurs, la liberté de ses impressions. Les deux hommes sont nettement différents, nous le savons tous.
Notre société est rouennaise : Flaubert l’était aussi, mais en ronchonnant de l’être. Maupassant le fut quelque temps, et il était aussi normand. Notre devoir de nous en souvenir et de nous intéresser à lui, ne gêne pas son Maître.
Tous nos bulletins vivent difficilement. Les factures d’imprimerie nous rappellent aux réalités contingentes. Nous n’avons pas assez de membres pour vivre, comme nous voudrions pouvoir agir, et nous pensons qu’en y associant Maupassant, nous ne disons pas, en nous l’accaparant, nous ne pouvons qu’augmenter notre effectif français et étranger. Il faut penser avec les nécessités financières de notre temps, mieux associer des littérateurs voisins que préparer une disparition, par fidélité d’orgueil !
Nous aimerions recevoir des articles qui intéressent Bouilhet, Maupassant, mais aussi les frères Goncourt. Nous ne disons pas Zola qui a une société florissante et un bulletin semestriel comme le nôtre. Et puis, il faut le dire, de temps à autre, nous éprouvons la crainte de ne pas avoir assez d’articles pour meubler nos quarante-huit pages. Alors, en nous étendant à tous ceux qui furent les amis du romancier de Croisset, nous restons dans ce cercle qui fut actif et bien vivant. C’est à vous de nous manifester vos craintes ou vos espérances.
André DUBUC.