SOMMAIRE
ÉDITORIAL
par Yvan LECLERC
FLAUBERT, BOUILHET, MALOT, MAUPASSANT ‒ L’ÉCOLE DE ROUEN
L’École de Rouen, une chimère à deux visages
par Francis Marcoin
L’École de Rouen dans la Revue de Rouen, à partir de 1833 : une École de Rouen avant l’École de Rouen
par Joëlle Robert
Madame de Montarcy (1856) : Bouilhet, Flaubert et les quarante rouennais
par Christa Delahaye
Flaubert et l’École de Rouen
par Yvan Leclerc
« Être de la même coterie » : Les Mémoires d’un critique du « petit » Levallois
par Agnès Thomas-Vidal
ACTUALITÉ DE LA RECHERCHE ET DES PUBLICATIONS SUR FLAUBERT ET MAUPASSANT
L’« homme-plume », de la Correspondance aux romans de Flaubert
par Corinne Trichet
Le Flaubert de Nabokov : entre hommage et appropriation
par Léopold Reigner
Les voyages de Maupassant au Maghreb
par Lassad Affi
Réflexion à partir du récit d’une traversée de Dieppe à Newhaven : la visite aux parents dans Bel-Ami et Minnie Brandon de Léon Hennique
par Philippe Rouyer
FORTUNE ET INFORTUNE DES FLAUBERT
Présentation de l’ouvrage Fortune et Infortune des Flaubert. Tome I : De Nicolas Flobert à Achille Cléophas Flaubert.
par Daniel Fauvel
Le sort du testament inédit d’Achille Cléophas Flaubert
par Hubert Hangard
Les Flaubert et la ferme de Monville-Anceaumeville
par Hubert Hangard
TABLE RONDE DE MARTAINVILLE, « ÊTRE UNE FEMME CHEZ FLAUBERT ET MAUPASSANT »
Quelques propos sur Madame Flaubert
par Joëlle Robert
Être une femme dans la vie de Flaubert
par Daniel Fauvel
Gustave et Caroline, sa mère
par Yvan Leclerc
George Sand, l’ami.e de Flaubert
par Véronique Bui
VARIA
Bouvard et Pécuchet, deux retraités heureux
par Jeanne Bem
François Depeaux, en mémoire de Flaubert
par Guy Pessiot
Pavel Florensky, lecteur de Flaubert. Le saint Antoine de l’œuvre et celui de la tradition de l’Église
par Eugène Ternovsky
La Révolution de 1848 à Paris avec Gustave Flaubert
par Michel Lambart
COMPTES RENDUS
Gertrude Tennant, Mes Souvenirs sur Hugo et Flaubert, Paris, Éditions de Fallois, 2020
par Joëlle Robert
Jacqueline Lalouette, Un peuple de statues. La célébration sculptée des grands hommes, Paris, Éditions mare & martin, 2018
par David Michon
INÉDIT
Deux lettres inédites de Maupassant à Emmanuel Gonzalès
par Christoph Oberle
NÉCROLOGIE
Peter Michael Wetherill
par Tim Unwin, traduction par Jeanne Bem
RÉSUMÉS
Éditorial
Yvan Leclerc
L’année 2020 avait pourtant bien commencé. Deux fois 20, c’était comme un retour de jeunesse et une promesse de grande forme. Nos deux auteurs, devenus des classiques, secouent la poussière des vieux livres et retrouvent une étonnante vigueur dès qu’on les rouvre. Avant l’année 21, que nous consacrerons entièrement à Flaubert pour commémorer le bicentenaire de sa naissance, 2020 était réservé à Maupassant. L’actualité éditoriale le servait admirablement, puisque venait de paraître le premier volume de ses Chroniques, publiées entre 1876 et mars 1882, inaugurant ainsi la série des Œuvres complètes sous la direction d’Antonia Fonyi, en cours chez Garnier. Les deux éditrices scientifiques de ce premier tome, Marie-Françoise Melmoux-Montaubin et Anne Geisler-Szmulewicz sont venues présenter leur rigoureux travail d’établissement de texte et d’annotation, lors de l’assemblée générale du 18 janvier. La veille, Anne-Bénédicte Levollant et le personnel de la Bibliothèque patrimoniale avaient proposé aux membres de notre association une visite guidée de l’exposition « De pièces en pièces : 10 ans d’enrichissement patrimonial ». Cette date tombait au moment des « Nuits de la lecture » : l’Hôtel littéraire Flaubert s’était alors ouvert pour que le public vienne y entendre des chroniques choisies par les deux éditrices, et lues par Joëlle Robert, Sophie Pouliquen, Joël Dupressoir et Gilles Cléroux. Sur le programme généreusement proposé par l’Hôtel littéraire Flaubert, on trouve cette formule étonnante : « Lecture suivie d’un cocktail ». Un cocktail ! On croit rêver : en ce temps-là, on se parlait à moins d’un mètre de distance, on se serrait la main, on s’embrassait, on trinquait. Le lendemain, après l’assemblée générale, on a encore mangé la galette et on a bu du cidre. On était bien une quarantaine dans quarante mètres carrés. On aurait dû se méfier de la quarantaine.
Avant de rentrer chacun chez soi, la journée d’étude suivante prévue au programme, le 15 février, a donné à l’auditoire en présentiel (ce mot barbare existait à peine) l’occasion de se réjouir grâce à « Histoire d’en rire dans l’œuvre de Maupassant », comédie érudite mise en scène par Catherine Botterel-Michel, éditrice des Dimanches d’un bourgeois de Paris, paru depuis en Folio, avec Anne-Simone Dufief, Brigitte Bouvier, Daniel Sangsue et Daniel Grojnowski. Louis Forestier a fait à celle dont il avait dirigé la thèse et à tout l’auditoire l’honneur de sa présence. Ce fut pour l’Association le moment de rendre un juste et vibrant hommage à l’éditeur savant et à l’homme savoureux, auquel Yvon Robert, maire de la cité, a remis à cette occasion la médaille de la ville, décernée en signe de reconnaissance symbolique aux personnes qui ont permis par leur œuvre de faire rayonner Rouen. Louis Forestier a introduit son propos liminaire en citant les mots d’un personnage de Maupassant, victime d’une farce : « Ah ! on a ri, ce jour-là », et il l’a conclu par ces mots prophétiques : « nous contemplerons le spectacle du monde comme il va, et il va souvent mal ». Chez Maupassant, le rire grince, et la farce dégénère souvent en tragique.
Les deux rendez-vous prévus en mars ou en juin ont pu être reportés et avoir lieu entre les deux confinements, au mois de septembre : « Le Rouen de Maupassant », avec une visite guidée par Guy Pessiot et des conférences à l’invitation des Amis des Musées d’Art de Rouen, et le voyage à Saint-Jouin-Bruneval chez la Belle Ernestine et dans les flaques d’eau où se mouillent Jean et Mme Rosémilly, dans Pierre et Jean, en compagnie de Gilles Honoré et d’Agnès Desarthe, lectrice inspirée et inspirante. Et ce fut tout. Il a fallu annuler, ou du moins reporter sine die, les deux dernières rencontres annoncées, « Maupassant à l’école » et la séance bilan de fin d’année. Elles seront reprogrammées dès que possible.
Certes, nous savons que nos deux auteurs ont eu affaire avec la maladie, personnelle et collective, la « grande vérole » de l’époque, atténuée chez l’un, fatale pour l’autre ; que l’aîné a souffert de crises nerveuses « épileptiformes », selon le mot de son frère Achille. Nous savons aussi que Flaubert a connu l’épidémie de choléra en 1832 à l’Hôtel-Dieu ; qu’il a vécu en quarantaine au lazaret de Beyrouth, mais ces 40 jours théoriques ont perdu leur zéro pour se raccourcir en seulement 4 jours, du 19 au 23 juillet 1850. Nous savons tout cela, nous ne nous attendions pas à ce qu’ils soient à nouveau percutés par une pandémie dont ils n’auraient pas pu avoir l’idée, dans un monde cloisonné où les épidémies ne se propageaient pas à la vitesse des avions.
Fort heureusement, il nous reste le papier pour manifester la permanence des écrivains et de l’écrit. Le présent numéro des Cahiers, à nouveau soutenu par le CNL, regroupe l’ensemble des communications proposées en 2019 : la journée sur « l’École de Rouen » littéraire, organisée avec les Amis d’Hector Malot ; la traditionnelle revue de fin d’année qui fait le tour des publications récentes sur Flaubert et sur Maupassant et la table ronde organisée au Château de Martainville en marge de l’exposition « Femmes, je vous aime… Être une femme en Normandie du xviiie siècle au début du xxe siècle ». Jeanne Bem a bien voulu nous donner le texte de la conférence-lecture qu’elle a écrit sur la dernière œuvre de Flaubert, « Bouvard et Pécuchet, deux retraités heureux », qui permet d’entrer dans un roman souvent jugé difficile d’accès d’une manière sensible et vivante, et Christoph Oberle nous a confié deux lettres inédites de Maupassant, autour de la statue de Balzac.
La nouvelle commence à faire du bruit : l’année 2021 verra la commémoration du bicentenaire de la naissance de Flaubert. Le programme des Amis de Flaubert et de Maupassant a reçu le label « Flaubert 21 ». Il prend place parmi les quelque cent cinquante manifestations prévues à Rouen, en Seine-Maritime, en Normandie et ailleurs pendant toute l’année. Notre calendrier sera rendu public dès que les conditions seront réunies pour que nous l’arrêtions définitivement. Alors, nous pourrons nous retrouver, tomber les masques, manger la galette comme avant, boire du cidre, trinquer, nous serrer la main à la bonne franquette et nous embrasser comme du bon pain. L’habitude reviendra assez vite.
En attendant, il nous reste la lecture : nos deux classiques à revisiter et de belles découvertes à faire.